peut-ON FAIRE DU YOGA EN COURANT ?
Des Yoga Sutra au running
Vivre les Yoga Sutra
Pendant ma formation de professeur de yoga au sein de l’IFY (Institut Français de Yoga), j’ai eu grâce à ma formatrice, Marie Françoise GARCIA, la chance de recevoir une instruction très pratique des YOGA SUTRA de Patanjali. (Le YOGA SUTRA est l’ouvrage de référence de nombreux yogis).
Il ne s’agissait pas, en effet, de seulement lire ces sutras et d’en comprendre le fond de manière théorique mais nous avions entre chaque week-end de formation des périodes d’environ 1 à 2 mois où nous devions les mettre en pratique
Expérimenter les NYAMA
Je me souviens particulièrement du travail expérimental sur les NYAMA, les règles d’éthique personnelle et notamment sur ASMITA : le travail sur l’ego problématique, décrit par Patanjali au chapitre 2.
Asmita, c'est comme s'il y avait confusion de 2 capacités, celle de l'instrument de conscience (cita) et celle du témoin (purusa, conscience). Asmita : c'est le petit moi qui se prend pour le grand moi. L'activité du mental qui se prend pour la conscience elle-même
Observer mon ego pendant quelques semaines, son fonctionnement et les souffrances que cela engendrait car cet ego n’était pas à sa juste place a bouleversé mes relations aux autres. J’ai pu enrayer le mécanisme de ma colère qui prenait source dans un ego et des attentes mal placés. Mais venons-en au running.
Expérimenter PRANASYA
Au chapitre 1 des YOGA SUTRA, Patanjali liste les obstacles à la pratique du yoga, leurs symptômes ainsi que les possibles actions pour surmonter ces obstacles. Toujours dans cette logique de vivre les YOGA SUTRA dans notre chair nous avions eu, lors de notre étude du chapitre 1, à choisir l’un des remèdes proposés par Patanjali lorsque nous traversons un moment difficile et à en faire l’expérience
Les obstacles à la pratique sont la maladie, la léthargie, le doute, la précipitation, l’épuisement, la tentation, l’intolérance, la stagnation et la régression. Les symptômes perturbateurs issus de ces obstacles sont la souffrance, les pensées négatives, l’incapacité à être tranquille et avoir une respiration anarchique.
Parmi les options proposées par Patanjali pour surmonter une période difficile quand les moyens habituels ne sont pas suffisants, j’ai choisi d’expérimenter le sutra 1.34 et donc de vivre à une expérience sur l’expiration :
il faut expulser Prana qui s’enkyste en travaillant sur l’expiration et la suspension à vide
Cette visualisation d’un prana (ou énergie) qui s’enkyste et que l’on peut décoincer et libérer par l’expiration m’a tout de suite fait penser à la course à pied. Il y avait bien la possibilité de faire l’expérience d’un pranayama (exercice de respiration) tel que KAPALABHATI que je pratiquais déjà mais j’avais, à ce moment-là, la sensation d’un prana enkysté dans tout le corps, tous les membres et je cherchais un « déblocage » plus radical, plus complet. J’ai alors décidé, moi qui détestais cela, de me mettre à la course à pied. Je me souvenais en effet que courir me faisait beaucoup expirer. Je me suis donc décidée à aller courir au parc de la Tête d’or à Lyon avec une respiration favorisant des expirations actives et des inspirations passives.
Pourquoi privilégier l’expiration quand on se sent « enkysté », « bloqué » ? C’est que l’expiration permet en effet d’expulser des choses sur tous les plans : physique et psychique. Le mots “Enkysté” correspond à l’aspect circulatoire. Au yoga on dit que « où va citta (le mental) va prana (l’énergie) ». Mais si l’énergie est bloquée alors le mental aussi est bloqué, et c’est en cela que la course à pied est fabuleuse pour le yogi qui cherche à faire circuler prana lorsque les autres moyens ne suffisent plus.
Mais si d’un point de vue énergétique, la course à pied fait circuler prana dans le corps, qu’en est-il du mental dans la course ?
Quel est l’impact de la course à pied sur le mental et en quoi est-ce du yoga ?
Clarifier le mental
Il est tout à fait possible de méditer en courant. Je choisis un objet de méditation, souvent un problème à régler, une solution à trouver et je me livre à une méditation réflexive sur cet objet le temps de la course à pied. Le travail de circulation de l’énergie dans le corps permet au mental plus de clarté, plus de lucidité. J’arrive à mieux déblayer mes pensées, mes idées en courant, quand ça circule dans tout mon corps.
Dans ce type de méditation, j’ai notamment trouvé le nom de mon projet « Inclusive Yoga ». Comment gérer certains problèmes professionnels et familiaux aussi. J’ai élaboré les plans de la plupart des articles de mon blog en courant. Cet article a été conçu au parc lors d’un running.
Méditer ainsi en courant me permet d’arriver à plus de discernement, plus de lucidité et de faire des découvertes.
Sortir d'une méditation sans avoir rien découvert de neuf, c'est ne pas avoir médité.
Samadhi au détour du chemin
Parfois mon objet de méditation c’est le parc, la nature. Je décide de contempler cette merveilleuse nature et de revenir à la contemplation, tout comme je reviens à la conscience du souffle dans un cours de yoga postural, dès que le mental veut reprendre le contrôle et émet pensées et jugements.
Et la magie se produit souvent, au détour du chemin, un écureuil apparaît et me ravit. Puis je reviens à moi. Je me rends compte comme c’était magnifique. Dans ces instants de ravissement, je ne suis plus moi, je n’ai plus d’ego, d’identité, je suis absorbée par l’écureuil, l’arbre, l’eau ou la fleur. Et je me rends compte de mon absorbation dans l’objet de méditation, seulement une fois que j’en suis ressortie. C’est ce qu’on appelle Samadhi : moment où le mental n’est plus là, ce qui est là c’est l’objet qui brille dans sa propre forme.
Le yoga ne se réduit pas à l’aspect postural, beaucoup de nos expériences peuvent devenir des moments de yoga. Ainsi, si on me demande si j’ai fait du yoga aujourd’hui et que j’ai simplement couru au parc en méditant, je réponds oui.
Daphné – INCLUSIVE YOGA
Nos cours de yoga impliquent un travail sur le souffle (exercices de pranayama) et sur la canalisation du mental (méditations, visualisations, pleine conscience).
Intéressant ce parallèle entre yoga et course à pied ! Cela montre bien que tout peut devenir yoga, du moment qu’on est totalement absorbé à ce qu’on fait.
Merci pour ton article. En le lisant, il me revient une anecdote sur yoga et running. Une de mes amies en ahstanga, d’un excellent niveau de pratique, dont beaucoup de pranayamas, participe à une sortie course à pied, sans avoir couru depuis des années. Elle était persuadée que le yoga avait entretenu ses capacités cardiovasculaires…et bien…non ;). Not at all ! Sinon, je te rejoins aussi, le yoga peut s’exprimer dans tous les aspects de notre vie.
Merci Muriel pour ton retour, concernant l’asthanga il y a une étude physiologique très intéressante de Rodolphe Milliat dans son livre “pédagogie des asanas”. Il y calcule et compare les fréquences cardiaques d’une série de postures privilégiant la statique et d’une série dynamique de type asthanga et s’il mesure qu’en astahnga le rythme est plus élevé, il conclut sa recherche ainsi “cette forme de yoga procède en permanence par aller-retour sur des fréquences dissemblables … le système cardiovasculaire ne peut donc pas se stabiliser durablement dans le travail spécifique de l’endurance . Seule une fréquence constante entre 110 et 140 le permettrait”. Ainsi sa recherche l’amène à affirmer que le yoga ne peut influer sur les capacité de VO2 max et qu’un effort aérobie modéré de 30 min à plus d’influence surla VO2 max qu’une pratique quotidienne d’asana. Mais ouf, le yoga a tant d’autres effets 🙂
Merci pour ton partage
Et bien moi je ne pratique pas la course à pied mais la natation et je t’avoue qu’une forme de yoga peut effectivement s’appliquer à cette pratique: respiration, concentration sur divers parties du corps etc…
Le yoga peut s’inviter partout dans nos vies.